dimanche, 23. octobre 2011

A propos du rapport Vaillant

Tous les anti-prohibitionnistes attendaient le fameux rapport Vaillant.

Sa parution a surtout provoqué une très bonne campagne de communication gouvernementale, destinée à l‘ensevelir sous de lourds gravats.

Pourtant ce rapport parlementaire Pour mieux lutter contre le cannabis : sortir de l‘hypocrisie n‘a rien d‘un brûlot révolutionnaire.

Avec un bon sens très mesuré, il se contente de remarquer que c‘est après la promulgation de la loi de 1970 que s‘est développée la consommation. Que d‘après les études de l‘OFDT, chez les jeunes de 17 ans, plus le milieu d‘origine est favorisé, plus la consommation tend à augmenter1. Que les artisans, commerçants, chefs d‘entreprises et ouvriers sont les catégories les plus «clientes», les cadres étant dans la moyenne pour le cannabis. Mais les chômeurs ont une consommation plus élevée que les actifs2

Il pose également les conditions et les limites de la répression actuelle qui au nom d‘un «confort de l‘interdit» dérive dans la simple «politique du chiffre» qui a entraîné 580 108 gardes à vue en 2009, sans compter les «infractions» routières3. Ce qui sert commodément l‘objectif sécuritaire du gouvernement sans s‘attaquer à la délinquance organisée4. Et parle du coût du cannabis pour la santé publique, toutes campagnes de prévention confondues, 0,06% du PIB en 2007. Alors que l‘alcool coûte à la société 2,37 % du PIB, et le tabac 3,05 %5

Enfin il évoque l‘embarras de la justice face à l‘inadaptation de la loi, l‘hétérogénéité des réponses apportées par les tribunaux selon les territoires et les profils socio-économiques des consommateurs voire même des simples revendeurs. Mais aussi, en ouverture il parle du «thérapeutique» avec une certaine véhémence, proposant de légiférer promptement grâce à une loi à part entière. Afin «de ne pas tomber dans le refus de soin, ou une forme de non assistance à personne en souffrance, pour ne pas dire en danger»

 

Légalisation contrôlée

La réponse de l‘équipe parlementaire est de préconiser la mise en place rapide d‘une politique plus réaliste et donc plus efficace.

Le rapport reprend la proposition émanant de Francis Caballero d‘une «légalisation contrôlée du cannabis».

Partant du principe qu‘il ne faut pas confondre conséquences et causes, il propose dans un premier temps la mise en place d‘intervenants professionnels adaptés aux contextes, dans un but de prévention pragmatique. Et surtout l‘encadrement par l‘état de la production et de l‘importation des produits proposés à la vente, avec filière horticole labellisée. La distribution se ferait dans des débits, simples ou autorisant la consommation, dont bien évidemment les mineurs seraient exclus.

Cette proposition assez radicale dans l‘ambiance actuelle ayant comme objectif principal de s‘attaquer frontalement au problème qui paraît rester assez annexe dans l‘application des lois sécuritaires, la lutte effective contre les mafias qui alimentent le trafic. Les gros importateurs s‘épanouissent sans trop de difficulté semble t-il avec cette prohibition gage de sauvegarde de la santé publique, comme on dit au gouvernement. En dehors de la contrariété pour leurs intermédiaires de devoir remplacer plus ou moins régulièrement leurs petits revendeurs.

D‘ailleurs, en auraient-ils pressenti le danger ? En tout cas, dans certains coins de France il devient maintenant parfois plus simple de se procurer de l‘héro, qu‘une petite tête de Beuh. Les prises, hors cannabis, si elles existent restent assez discrètes.

 

En route vers ??

Mais était ce bien son objectif que de tout vouloir traiter ? Il affiche visiblement plus une simple volonté d‘alerter officiellement, par le biais de parlementaires représentants les citoyens, sur le blocage totalement désastreux de la situation actuelle, en confirmant localement, les conclusions du dernier rapport de la Global Commission on Drug Policy.

On est enclin à repenser au chemin raboteux et escarpé de la caverne dont parlait Platon. La réaction du président du groupe socialiste à l‘Assemblée «si la gauche vient au pouvoir, on pourra créer une commission de consensus pour dégager des solutions» porte en elle les ferments de l‘immobilisme. De même qu‘il faudrait également analyser pour les résoudre les divers problèmes sociaux collatéraux qui sont issus de cette prohibition. Ils commencent à pouvoir émerger franchement mais les solutions ne peuvent venir que d‘une ferme volonté d‘en sortir. A force de s‘embourber dans les marécages vertueux et déconnectés de la réalité réelle, il risque de devenir de plus en plus complexe d‘en sortir normalement. C‘est ce contre quoi s‘insurge ce rapport parlementaire.

 

1 O.F.D.T. ESCAPAD 2005

2 0.F.D.T. Cannabis données essentielles. 2007 / Baromètre santé 2005. INPES – Exploitation OFDT

3 Fondation Jean Jaurès. J.J. Urvoas Note 76 – janvier 2011

4 Alliance police nationale n° 272 Mars 2011

5 O.F.D.T Christian Ben Lakhdar 2007

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www.lemonde.fr/societe/article/2011/06/15/daniel-vaillant-pour-mieux-lutter-contre-le-trafic-de-cannabis-il-faut-legaliser-sous-controle_1536320_3224.html

 

Par Ananda S.

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