mardi, 6. décembre 2011

Conférence sur les Cannabinoïdes 2011

E nviron 220 scientifiques, docteurs, étudiants, et autres personnes, originaires principalement d‘Europe, ont participé à la Conférence sur les Cannabinoïdes, qui s‘est tenue à Bonn, du 8 au 10 septembre dernier. Cette sixième édition était associée à la cinquième rencontre du Groupe de travail européen de recherche sur les cannabinoïdes. Une quarantaine de travaux de recherche ont donné lieu à une présentation orale par des intervenants invités et ceux dont les articles avaient été retenus. Près de soixante-dix conclusions d‘études ont aussi pu être présentées. La plupart des études et des discussions ont concerné les recherches sur les endocannabinoïdes et le système endocannabinoïde. En voici un rapide survol avec les présentations les plus marquantes.

Dr. Ilya Reznik du MaReNa Diagnostic and Consulting Center, à Bat-Yam, en Israël, a présenté une étude observationnelle sur la consommation de cannabis chez les personnes atteintes de Stress Post-Traumatique (PTSD). La condition mentale de 79 adultes atteints du PTSD a été évaluée (cette évaluation fait partie du travail de routine de l‘équipe de recherche). Les malades avaient au préalable demandé au ministre de la Santé l‘autorisation de consommer du cannabis à des fins thérapeutiques. Seulement la moitié d‘entre eux avait obtenu une autorisation, et pu participer au groupe d’étude. Ces patients ont été suivis sur une période de deux ans. La majorité des patients observés prenaient aussi la prescription conventionnelle de leur médecin traitant. Le dosage de cannabis variait de 2 à 3 grammes par jour. Dans la plupart des cas, une amélioration significative de la qualité de vie, la diminution de la douleur, ainsi que quelques changements positifs de la sévérité des symptômes du PTSD ont été observés. Les patients ont aussi indiqué avoir réduit spontanément le dosage d‘autres sédatifs et analgésiques pris comme traitement. La majorité des patients qui ont mentionné une amélioration des symptômes appartient aux groupes souffrants soit de douleurs supplémentaires, soit de dépression. Les chercheurs ont conclu que : « les résultats montrent une bonne tolérance, ainsi que d’autres bénéfices, spécialement chez les patients atteints de douleurs et/ou de comorbidité dépressive. »

Dr. Tim Beumer, du laboratoire pharmaceutique Echo, aux Pays Bas, a indiqué qu‘il réalisait une étude clinique en phase II pour connaître les effets de sa préparation à base de THC, le Namisol, sur la spasticité et la douleur des patients atteints de Sclérose en Plaques, sur les dysfonctionnements de comportement des patients atteints de démence, et sur la douleur des patients atteints de pancréatite chronique. Le Namisol est une nouvelle formulation du THC qui utilise une technologie développée afin d’améliorer la biodisponibilité des composés lipophiliques chez l’homme. Lors de l‘ administration orale du Namisol, les niveaux les plus élevés du THC ont été observés 30 à 45 minutes après la prise.

Dr. Arno Hazekamp, de l‘Université de Leiden, aux Pays Bas, a donné les résultats d’un sondage sur les méthodes d’administration du cannabis et des cannabinoïdes à usage thérapeutique. Une étude transversale a été réalisée en publiant un questionnaire, en cinq langues, sur le site web de l’IACM, entre le 18 août 2009 et le 31 janvier 2010. Elle était destinée à savoir comment les patients perçoivent les avantages et les inconvénients des différents modes d‘ administration du cannabis, et leurs préférences quant aux produits. L‘étude était aussi destinée à déterminer si les préférences dépendaient de paramètres démographiques, d‘expériences préliminaires de consommation de cannabis récréatif, de maladies, ou de la participation d‘un médecin pour l‘utilisation des cannabinoïdes. 953 patients (614 hommes et 339 femmes), d’âge moyen 40,7 ans, ont rempli le questionnaire. La plupart des participants provenaient des États-Unis, d‘Allemagne, France, Canada, Pays-Bas, d‘Espagne et du Royaume-Uni. Dans 47,6 % des cas, les produits à base de cannabis étaient prescrits ou recommandés par un médecin et les patients se le procuraient, pour 10,4 % dans une pharmacie, dans un coffee-shop (26,3 %) ou un lieu toléré. Les modes préférés d’administration du cannabis sont : fumer (62,9 %), inhaler (23,6 %), manger en le mélangeant à de la nourriture (7,9 %), boire sous forme d’infusion (2,4 %) et avaler pour le Dronabinol/Marinol (1.8 %). Les différences significatives sont indépendantes du pays, de la maladie ou d’autres paramètres. Les résultats ne sont pas représentatifs.

Le Dr William Notcutt de l‘Hopital universitaire James Paget à Great Yarmouth, Royaume Uni, a mené une étude observationnelle pour décrire les critères d‘ utilisation clinique du Nabilone, un dérivé synthétique du THC. Les données provenant de trois centres regroupant 134 patients ont été collectées. La Douleur (87%) et la spasticité/spasmes (25%) représentaient les principaux symptômes traités. Le bénéfice remarquable concernait les améliorations relatives à la douleur (78%), à la spasticité (19%) et pour le sommeil (49%).

Dr. Attila Olah de l‘ université de Debrecen, en Hongrie, a démontré que le cannabidiol (CBD) est un tout nouveau, très efficace agent sebostatique, qui sert donc à réduire l‘activité des glandes sébacées de la peau. Le CBD servirait en application dans un traitement pour des troubles du derme comme l‘acnée vulgaris, qui se caractérise par une pathologie élevée de la production de sébum par les glandes sébacées.

Dr. Jeffrey Hergenrather du groupe médical de recherche sur le Cannabis, à Santa Monica en Californie (USA), a présenté une évaluation rétrospective concernant 38 patients atteints de la maladie de Crohn et de Recto-colite ulcéro-hémorragique. Les patients ont rapporté des améliorations significatives de leur état et de leurs symptômes quand ils utilisent du cannabis. Leurs selles quotidiennes, la fréquence des poussées, comme leur sévérité diminuaient de manière significative. Une série de symptômes comme les douleurs, la nausée, le vomissement, la fatigue et la dépression réduisaient de moitié pour les patients utilisant du cannabis.

Dr. Miriam Schneider de l‘Institut pour la santé mentale de l‘université d‘Heidelberg, en Allemagne, a engagé des recherches sur les conséquences de l‘ exclusion sociale et les formes de rejet au cours de l‘adolescence sur un modèle animal. Sur des animaux arrivant à maturité, ils ont découvert que la perception de la douleur et la réaction au stress subissaient des altérations. Le système endocannabinoïde semblait présenter une modification persistante. En conclusion, l‘exclusion sociale des adolescents a pour conséquence un accroissement de la sensibilité à la douleur qui perdure longtemps en raison des modifications dans le système endocannabinoïde.

Dr. Stefan Engeli de l‘école médicale de Hanovre, en Allemagne, vient de découvrir que l‘ augmentation de la pression sanguine chez les personnes atteintes de l‘apnée du sommeil d‘origine obstructive est associée avec l‘ augmentation des concentrations endocannabinoïdes en circulation. Les concentrations endocannabinoïdes des victimes d‘apnée du sommeil étaient en augmentation en comparaison avec le groupe des personnes en bonne santé. C‘est la concentration d‘anandamide qui corrélait fortement avec la pression sanguine des personnes faisant de l‘apnée du sommeil. Les résultats de cette étude suggèrent une fonction de régulation de la pression sanguine par le système endocannabinoïde, totalement inconnue à ce jour, pour les personnes atteintes de problèmes cardiovasculaires et d‘hypertensions.

Lisette Wijnkoop, de la Fondation NCSM a conclu un rapport sur l‘utilisation thérapeutique du cannabis aux Pays Bas. En 2011, quatre variétés de cannabis standardisées, sous contrôle de qualité, étaient disponibles dans les pharmacies néerlandaises, sous la licence du producteur Bedrocan. Sur la période 2003-2010, près de 40 000 prescriptions pour environ 6000 bénéficiaires ont été dénombrées. Au cours des dernières années, il a été constaté une augmentation significative du nombre de patients utilisant le cannabis pour des raisons médicales, passant d‘environ 850 patients en 2006, à près de 1300 en 2010.

Franjo Grotenhermen, M.D.

Directeur de l‘ International Association for Cannabinoid Medicines IACM

Email: info@cannabis-med.org

www.cannabis-med.org

Pour plus d’information :

Toutes les contributions recueillies sont disponibles et téléchargeables (en anglais) sur cette adresse :

www.cannabis-med.org/meeting/Bonn2011/abstractbook.pdf

Par Dr. Franjo Grotenhermen

 

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