Par 16 voix sur 29 le Sénat uruguayen a voté pour la légalisation du cannabis sous contrôle de l’Etat. La majorité n’est pas grande et est due au seul parti Frente amplio. Il y reste encore la vérification de constitutionnalité, et les signatures des décrets d’application. Mais pour la première fois, un état a osé se rebeller contre l’obsolescence de lois mondiales qui n’ont fait que créer des problèmes bien pires que ceux qu’elles voulaient, ingénument ou avec des motivations peu avouables, combattre. C’est au nom du réalisme que cette loi a été votée. C’est pour tenter une alternative aux narcotrafics, à la grave déstabilisation sociale et aux préjudices sanitaires qui contribuaient à gangrener le pays. Il ne faut pas sous estimer les critères économiques. Le poids des ravages d’une économie souterraine considérable s’additionne au coût financier, plus de 60 millions d’euros, d’une lutte sans résultat tangible.
Avec cette loi inédite de «régulation du marché du cannabis», l’objectif de Jose Mujica est de priver les narcotrafiquants d’une importante source de revenus. Mais il vise aussi, à limiter les risques liés à la consommation du cannabis et à détourner ses amateurs des dealers et par conséquence des drogues dures.
En Uruguay, la consommation de cannabis, mais aussi d’autres drogues, est autorisée. La coordination nationale pour la régulation du cannabis militait depuis longtemps pour plus de logique législative. Cela met fin à «une grotesque incongruité juridique» commentait un sénateur à la sortie du vote, puisque ni la production ni la vente ne permettait de satisfaire la consommation légale. L’Uruguay vote cette loi dans le cadre d’une série de textes en faveur de la défense des droits individuels a déclaré le sénateur Alberto Couriel au sortir des débats. Depuis la semaine dernière, une campagne gouvernementale informe des risques de la consommation de toutes les drogues. Ce type de prévention, dans un contexte dédramatisé, peut certainement avoir plus de poids que celle faite au nom du bien et du mal…. .
La loi uruguyenne prévoit trois modes d’accès au produit : l’auto-culture, la culture dans des clubs de consommateurs et la vente en pharmacie, sous contrôle public (40 grammes maximum par mois). Toute publicité sera interdite et les cultivateurs ou consommateurs – des résidents obligatoirement majeurs – devront s’inscrire sur un registre national.
Assurant mener une «expérience pour le monde», le président Mujica avait appelé ce week-end la communauté internationale à appuyer l’initiative, étant déjà soutenu par un groupe d’ex-présidents latino-américains.
Effectivement cela dépasse largement la tolérance fédérale pour les états de Washington et du Colorado, sans parler ce qui est timidement «accordé» par certains pays d’Europe. Le Portugal étant le seul cas un peu à part en portant depuis plus de dix ans une politique de dépénalisation globale, hyper encadrée, pour le pays. La permissivité de l’Espagne et des Pays Bas ou de la République Tchèque paraît se rétrécir un peu comme le soulignait Encod dans son communiqué de presse après avoir rencontrer la commission européenne pour que soient avalisées par les députés européens les recommandations du Conseil, non prises en compte depuis 2004. En juin 2011, un rapport de la Commission mondiale sur la politique des drogues, actait «l’échec» de la lutte antidrogue au niveau mondial, et préconisait «d’encourager l’expérimentation des gouvernements avec des modèles de régulation légale des drogues, en particulier le cannabis, afin de réduire le pouvoir de la criminalité organisée et de protéger la santé et la sécurité de leurs citoyens».
C’est donc l’Uruguay qui montre la voie dans cette courageuse première expérimentation de retour à la légalité.
60% de la population se dit contre, y compris les pharmaciens dont le rôle était important dans le dispositif. Mais les aménagements ont jusqu’en avril 2014 pour être affinés. «Il existe beaucoup de doutes. Et le doute est légitime, mais le doute ne doit pas nous paralyser pour emprunter de nouvelles voies face à un problème qui nous affecte», avait déclaré le président Mujica.
Tous les militants de la cause se sentent un peu uruguyens et reconnaissant à ce petit pays d’avoir osé se débarrasser du carcan étouffant, méprisant les libertés individuelles , au service d’une pseudo morale mondiale mais n’entraînant que la prolifération maffieuse nocive et désespérante
Autrement la fin de 2013 approche, et RBH voudrait remercier tous ceux qui participent à la bonne marche du journal, en particulier les diffuseurs dont le rôle est particulièrement important. Sans eux, le journal ne pourrait pas exister de la même façon. Merci beaucoup à eux.
Bonnes fêtes à tous.
Et vive l’Uruguay !
par Ananda